dimanche 31 janvier 2010

samedi 30 janvier 2010


Est-ce le soleil revenu, la neige fondant sous ses rayons, le chant des oiseaux au petit matin, je ne sais pas, mais il y a dans l’air un petit quelque chose qui m’appelle au grand large. La mer, cette mer si douce qui pourtant peut se gonfler d’écume ou se soulever de colère, si bleue, si verte, si grise, m’attire aujourd’hui. Depuis quand n’ai-je pas été au bord de ses flots, n’ai-je pas entendu le bruit incessant de ses vagues, n’ai-je pas été étendue sur ses plages au sable fin ? Une éternité. J’ai bien approché il y a peu l’océan aux Etats-Unis, trempé mes pieds dans la mer baltique à Jurmala, mais juste le temps d’un voyage, le temps d’un regard, car il y a des années que je ne suis pas allée en vacances pour un repos du corps et de l’esprit, que je ne me suis pas baignée dans l’eau salée, que je ne me suis pas allongée face au soleil pour simplement fermer les yeux et ne penser à rien. Si je m’écoutais à l’heure où j’écris, je filerai vers l’océan de je ne sais quelle contrée, prendrai un petit bateau à la voilure blanche et naviguerai en solitaire jusqu’à une île déserte. Heureusement qu’il y a les rêves ! Sans eux il n’y aurait plus d’espoir... et peut-être est-ce cela cette promesse retrouvée que depuis hier je recherche en vain, avoir l'éternité pour me reposer de tous les efforts accomplis afin de créer quelque chose de cette vie qui s'achève. Je ne pensais pas que je le vivrai ainsi mais c'est un cadeau d'une immense valeur de réaliser que l'on a malgré toutes ces perles brillantes tombées au fond de la vallée des larmes réussi à en ramasser une qui est l'Etoile que l'on a suivi tout au long de la route qui nous a été impartie. Bien sûr cela ne veut rien dire ce que je dis là, mais tant pis, tant mieux, tu as raison Yori, nos soixante années d'amitié sont plus fortes que l'égo du savoir, l'autre plus important que soi sans tomber dans la martyrologie. Chouette, un mot inventé, non ?

Voilà à quoi sert ce blog, à me confier, à voir l'évolution de la maladie, à être très à l'écoute de ce qui m'est dit et ô combien il faut faire attention à ne revevoir que le bon côté des mots, pas le négatif qu'il est inutile d'invoquer puisque de toute façon c'est trop tard. On n'a pas besoin de prédire ce qui arrivera au point de vue souffrance, laissons le destin s'accomplir, laissons les âmes comme la mienne confiante et naïve s'accomplir sans la noyer dans un labyrinthe de nons-dits quant à "Oh vous savez, on ne peut pas toujours calmer la douleur, on n'y arrive pas à chaque fois, faut s'y attendre, mais on fait ce qu'on peut".

Oui, tout le monde fait ce qu'il peut, c'est une évidence, et ici à la maison médicale Jeanne Garnier on en a tous conscience que c'est fabuleux même si d'autres unités de soins palliatifs sont égaux en soins,en humanité, en qualité.

D'ailleurs c'est là que je voulais venir, uniquement cet endroit m'appelait, j'ai déjà dû expliquer mille fois pourquoi, car je radote un peu ces derniers temps.

Et pour finir j'ai retrouvé l'essentiel de ce que je voulais exprimer dans le post précédent, mon fils, mon mari, Iveta, Aliénor, Anastasia, Jean-François, Anna, papa, mama, marraine, parrain, ma famille, Titi, Tosca, Troïka, eux, elles, mes amis, ils sont ma réussite, c'est eux l'importance de ma vie passée sur Terre, je m'en vais en les aimant très fort, et à présent je sais qu'eux aussi m'aiment très fort. Oui mon fils.

vendredi 29 janvier 2010

Voilà, je n'ai pas retrouvé ce que je désirais expliquer dans le post précédent, je ne peux l'exprimer que comme ça. Tant pis !
Merci à vous Jean-Marie et Anita.

Non, Monsieur Guillaume Durand ; enfin il me semble que c’est vous dont j’ai entendu les propos ce matin sur une radio dont je n’ai pas retenu le nom. Lorsque vous vous adressez à Monsieur Poivre d’Arvor en lui décrivant ce que vous ressentez à la lecture d’un passage de son livre d’entretiens, ce n’est pas votre ressenti que vous exposez mais bel et bien votre décision de ne pas apprécier cet extrait, de le clamer haut et fort et de l’affirmer. Aussitôt Poivre s’insurge, non pour contester dans le style soixante-huitard attardé dont vous paraissez être passé un peu le maître à mes yeux Monsieur Durand, mais par véritable intelligence du cœur parce qu’en effet comment parler de MARIE, la Mater Dolorosa, notre mère à tous, sinon avec des mots trop simples pouvant évoquer à certains cerveaux intellos hermétiques le mépris de l’expression populaire béni oui oui… Mais non, Monsieur Durand, on ne dit pas oui à tout, seulement donnez-nous une autre image pour présenter Marie ? Comment voulez-vous présenter Marie ? Voilà une toute jeune fille à qui l’Ange Gabriel vient annoncer qu’elle enfantera de l’Esprit Saint, qu’elle souffrira, qu’elle sera au pied de la Croix, enfin tout ce qu’il y a de plus douloureux de la vie de Marie et que nous connaissons sans pour autant l’avoir pour tout un chacun vécu dans notre chair. Pouvez-vous me dire ce qu’il y a de pire que la mort d’un enfant, tout Dieu incarné soit-il ?
A vrai dire en commençant ce post je voulais exprimer quelque chose qu’à l’instant même je ne me souviens plus, j’ai perdu le fil, hihi. C’est cela la maladie, l’esprit virevolte, saute d’un point à un autre, petit papillon un matin, luciole le soir, chien François d’Assise à l’aube. Connaissez-vous ce livre de Christian Bobin Le « Très-Bas » ? C'est à propos de Saint François d’Assise. A lire.
Mis à part cela, ne croyez-vous pas que j’ai une chance inouïe de mourir dans ces conditions ? Tant de morts atroces, Haïti, pour ne parler que du dernier drame naturel, tant de souffrance, bref, cessons la longue litanie qui ne peut être qu’une répétition de ce qui a déjà été dit, fait, entendu, écouté. On tourne en rond, ben oui, qui n’avance pas recule… Mais sans rigoler je commence à croire avec une promesse éternelle qu’il existe quelque chose de très fort. Si je m’en souviens demain, j’en parlerai. Sinon, en résumé, cela concerne cette fin de vie qui est l’un, je dis bien l’un, des moments les plus beaux de ma vie. Une chance ? Une Grâce ? Dieu ? Reverrons-nous nos parents ? Il y a encore tout ça à découvrir, c’est follement étonnant, et le plus beau est ce que me disent dans les commentaires celles et ceux qui ont accompagné leur mère et, ou, leur père pour leur dernier voyage et qui pour certains en gardent de doux souvenirs. C’est ce doux souvenir d’une grand-mère heureuse que je désire laisser à mes si chers enfants et petits-enfants.

mercredi 27 janvier 2010


Aujourd'hui j'ai tenu salon. Mon frère était là, mon fils aussi, puis mon mari m'a parlé au téléphone, ainsi que ma belle-soeur, et avant Yolaine, et qui encore? Ne sais plus, ce fut une longue et belle journée.
On pourrait dire mais qu'est-ce qu'elle nous raconte encore celle-là, ce n'est qu'une journée de malade ordinaire comme il en existe des milliers dans nos services hospitaliers avec plus ou moins de souffrance, de solitude, de détresse, de sourires également. Mais ces petits riens, y pensons-nous comme il se doit et combien ils sont devenus précieux car devenus uniques depuis que l'on a appris à ne plus faire de projets? Il est tout de même incroyable (et tant pis si je radote en répétant toujours la même chose) de réaliser qu'au mois d'août dernier j'étais assise sur une chaise de jardin à regarder les branches croulantes d'un pêcher situé au milieu de ce verger empli de fruits à me demander si l'année suivante je pourrai déguster autant de pêches joufflues tant elles ont donné cette saison.
Et pourquoi n'avoir pas profité du temp présent à simplement apprécier ce nectar au lieu de réfléchir à savoir pourquoi quand vient le soir pour qu'un ciel flamboie le rouge et le noir doivent s'épouser. Ah, Brel, combien ai-je larmoyé en l'écoutant chanter...
Non, en août prochain je ne cueillerai plus la pêche sur l'arbre, peut-être ne cueillerai-je pas non plus la cerise en juin, ni la fraise en avril.
Voilà pourquoi il faut être extraordinairement heureux de se dire que l'été prochain malgré toutes les disparitions, cycle de la vie, il y aura les feux de la Saint Jean, une chaude journée qui sentira bon les blés murs, un printemps qui jaillira comme une source éclatante de par ses milliers de petites bulles. L'air, l'eau, le feu, mon Dieu, c'est merveilleux de vivre, oui, bien sûr, je sais, la vie c'est souvent l'enfer, on ne réalise pas le prix de la vie quand on est simplement malheureux, comment trouver les mots justes pour réconforter quand on ne demande qu'à fuir la vie tant elle vous fait mal, semble vous avoir trahie, vous avoir piégée. Oui, il est facile de dire de regarder autour de soi pour retrouver cette étincelle de vie qui ne tient qu'à un fil. Pour moi la question ne se pose plus, mais pour les autres, le plus dur justement n'est-il pas de découvrir quel est ce fil?
On parle trop, on n'écoute plus l'autre, alors la seule chose que je puisse dire ce soir, en y pensant avec force, est-ce que vous vous rendez compte que vous pouvez faire des projets? Que rien n'est barré, pas d'obstacle à l'horizon, alors même si ça fait scout toujours prêt, tant pis, vite séchez vos larmes, moi je sèche les miennes pour apprécier l'instant présent. C'est magique.
Une Nini surcorticoïdée...

mardi 26 janvier 2010

De la fenêtre de ma chambre, voici l'inscription que j'aperçois. En-dessous se situe la Chapelle, au-dessus le dortoir des soeurs Xavières, gardiennes de l'esprit de la Maison médicale Jeanne Garnier. Comment écrit-on dortoir, avec un e à la fin ou pas? C'est à ce petit détail sans importance que l'on prend conscience qu'il se passe un déraillement dans la tête. Exemple je sais reconnaître ne plus savoir écrire un mot mais suis incapable de faire une recherche dans un dico pour faire une correction. Faire des fautes on s'en fout! devenir paresseuse, se ficher de tout, ça m'énerve.
Peut-on se rendre compte que j'ai commencé ma vie chez Garnier et que je la terminerai chez Garnier, même nom mais pas même dénomination. A l'Opéra de Paris c'était Charles, ici c'est Jeanne. L'un était architecte, l'autre Dame au Grand Coeur. On peut dire que je n'ai aucun regret d'avoir connu le grand escalier d'honneur de ce cher Charles même si l'Opéra de Paris restera la maison qui a le plus conditionné ma vie pas toujours dans le bonheur, mais mourir sous l'inscription au-dessus de la fenêtre de ma chambre et dans la Maison de Jeanne au Grand Coeur est un immense honneur.
Marie-France, votre amie est partie très vite, ma meilleure amie aussi est partie très vite, c'était en septembre 2001, une chimio et la voilà envolée vers l'ailleurs. Il n'y a pas de garantie pour cette maladie, je n'ai pas la solution, ni le grand ponte qui s'est cru plus fort que tout en annonçant sans précaution la mort à venir. Votre amie voulait vivre, tout tenter, elle avait raison. Je voulais vivre, pas tout tenter après réflexion, ai-je eu raison? Mais je ne voulais pas vous blesser avec mes mots maladroits, ni personne. Vous savez, aujourd'hui je suis descendue, enfin on m'a descendue, à la Chapelle pour assister à la Messe. Il y avait deux lits et un fauteuil roulant dans l'assistance, et aussi quelques anonymes venus de l'extérieur. C'est tout. Notre société ne se pose plus beaucoup de questions spirituelles, et si elle s'en pose, elle parle énormément, beaucoup trop, on n'écoute plus, ou alors on s'écoute trop. Et c'est ce que je suis venue chercher ici, d'abord, en tout premier, car il serait injurieux de le nier, je suis venue ici par une très grande peur de la souffrance, peur de mourir étouffée mais on m'a promis que cela n'arriverait pas, et donc aussi avec beaucoup de sincérité je suis venue me mettre à l'écoute de Dieu. Je ne sais pas qui est Dieu, je me donne ce temps de vie qui me reste pour le connaître. Et peut-être me connaître aussi.

lundi 25 janvier 2010

Mon Dieu! me voilà à la maison médicale Jeanne Garnier! quelle chance, quel soulagement, quel extraordinaire volonté de la part de mon fils dont c'était le but de me faire hospitaliser dans ce service tellement en arrivant de Lettonie lundi dernier il m'a vue souffrir seule chez moi. Mais à présent, et depuis un moment déjà, je suis très bien prise en charge, d'abord dans la petite unité de soins palliatifs de l'hôpital de province où j'ai reçu les meilleurs soins avec beaucoup d'humanité, puis ici à Paris depuis ce matin. Je ne vais pas décrire l'ambiance, l'environnement, le décor de Jeanne Garnier, j'aimerais simplement rendre hommage à mon fils qui au vrai sens du terme m'a sauvé la vie, reprendre ce blog là où je l'ai abandonné pour cause de "failli mourir". J'y reviendrai demain, là il me faut souffler, réaliser que je vais peut-être pouvoir continuer un peu, et aussi prendre le temps de répondre à une jeune femme qui, dans les commentaires, imaginait que je méprisais le choix ce celles et ceux désireux de faire chimio et rayons. Pardon si je vous ai blessée, jamais, ô grand jamais cette pensée ne m'a effleurée, moi-même y ai mille fois réfléchi, mille fois pensé. Dormons un peu car là mes yeux brûlent, et reparlons-en demain.

A mon fils adoré, MERCI.

dimanche 24 janvier 2010

C'est la veille du départ. Demain matin, maman est transférée à Jeanne Garnier.

Le week-end s'est très bien passé, maman a pu récupérer un peu de souffle et même si les médicaments l'endorment un peu, elle reste très vive d'esprit.

Voici une photo prise cet après-midi, qui prouve que son moral reste au beau fixe malgré la maladie qui la ronge.


Eric

jeudi 21 janvier 2010

Maman va mieux. Elle est sous morphine pour la douleur, et sous anxiolytiques pour calmer ses angoisses relatives à ses difficultés de respiration.

Elle est encore trop faible pour écrire sur le blog, mais elle le fera dès que possible.

Bonne nouvelle, elle sera transférée lundi matin à Jeanne Garnier. En attendant, je reste auprès d'elle.

Merci à tous pour votre soutien et vos messages.

Eric

mardi 19 janvier 2010

Aujourd'hui maman a été transférée dans l'unité de soins palliatifs de l'hôpital. Elle va relativement bien, avec des crises d'étouffement tout de même assez régulières. Je l'ai appelée à 21h, elle vient d'avoir une piqure de morphine, j'espère qu'elle va passer une bonne nuit.

Sur sa feuille d'admission, il y a marqué en gros "TRES COURT SEJOUR". Bravo au génie qui a jugé bon de préciser ce genre de détails pour une unité de soin palliatif. On se dit que soit on va vite être expédié dans l'au-delà, soit qu'on sera vite renvoyé chez soi avec un pansement et une petite tape dans le dos pour faire de la place au patient suivant.

J'aurais envie de raconter pleins de choses sur cette journée passée avec maman à l'hôpital, mais impossible d'aligner une phrase correcte. Depuis un quart d'heure j'écris et j'efface, je pense qu'il est inutile d'insister.

Eric

PS: j'ai imprimé vos messages, et je le lui ai apporté dans l'après midi. Elle les a lu avec beaucoup d'émotion. Encore merci à vous!

lundi 18 janvier 2010

Annie, maman, a été hospitalisée ce matin aux urgences après une dégradation soudaine de sa santé ce week-end. Très grandes difficultés respiratoires, douleurs, vomissements permanents, impossible de gérer cela à domicile.
Comme le service de soins palliatifs de l'hôpital était complet, on a du la faire admettre aux urgences. Un lit devrait être prêt demain, en attendant ensuite un transfert à Paris, ville ou elle souhaite passer ses derniers jours. J'espère de tout mon coeur que Jeanne Garnier ou Saint Perine, à qui j'ai fait parvenir les dossiers Corpalif mis à jour, pourront l'accueillir.

Quand je l'ai quittée, vers 20h, elle allait déjà mieux. Sous oxygène et sous de nombreuses perfusions, elle a retrouvée un peu d'énergie et a même pu avaler un peu de soupe. Tout le personnel a été très gentil, et je pense qu'elle passera une bonne nuit.

Elle m'a demandé de mettre à jour son blog, afin de vous tenir au courant. Elle a été vraiment très touchée par les nombreux messages de soutien, et je remercie chacun de vous car tous ces petits rayons de soleil lui permettent de passer de plus belles journées.
Tant qu'elle ne pourra pas utiliser son ordinateur portable, je lui transmettrai vos messages, et donnerai des nouvelles sur son état de santé.

Eric, son fils.

samedi 16 janvier 2010

La nuit je ne rêve pas, enfin si c'est la cas je ne m'en souviens pas. La nuit je ne bouge pas non plus, pas un mouvement, je me réveille dans la même position que la veille au coucher. Pourtant cette nuit il s'est passé quelque chose d'inhabituel. On a frappé à la porte de ma chambre avec une telle force que cela m'a arraché un cri de protestation. Pourquoi un tel raffut? J'ai voulu ouvrir les yeux mais impossible, j'ai voulu me redresser mais là encore impossible. Puis le bruit a redoublé et j'ai réalisé que ce n'était pas à ma porte que l'on frappait mais sur ma hanche droite! Et cela me faisait un mal de chien évidemment! En fait je ne rêvais pas, j'étais simplement plongée au coeur ma propre souffrance et il m'a fallu me bouger avec mille précautions pour qu'enfin cesse l'horrible impression que l'on sciait ma hanche. Une mauvaise position dès le départ de la nuit sans doute. Et ce matin au vu de mes ganglions gonflés sur le cou j'ai su que la journée serait difficile. En fait de journée il ne s'est rien passé, ni en bien ni en mal, parce que j'ai passé cette pauvre journée à dormir d'un sommeil semi comateux formé d'un tas de délires. Ce qui me ramène à la question d'hier : Actiskenan ou Matrifen? Les deux médicaments sont de la morphine, l'un sous forme de cachet, l'autre en patch. La gélule s'avale facilement et libère immédiatement son pouvoir calmant, est-il indiqué. Le patch libère toutes les heures un certain nombre de microgrammes au pouvoir miraculeux m'a-t-on certifié. Sauf que les effets secondaires du patch sont hallucinants et dégueulants et ceux de la gélule dégueulants, moyennement efficaces mais pas hallucinogènes.

Oui ma pov'Lucette y'a pas de doute t'es pas sortie de l'Auberge Rouge où l'on trucide, super chouette les hallucinations!

L'infirmière a eu la gentillesse de me rappeler hier en insistant au téléphone pour que je mette le patch et que surtout je ne lutte pas contre le repos du corps. Puis elle a ajouté une phrase qui ce soir me trouble : "Il est possible que la dose soit trop forte, on verra ça lundi".

Lundi ??? Ben non, on n'attendra pas lundi que le corps médical soit revenu de son week-end pour étudier la valeur de mon patch. La valeur de ma vie a plus d'importance et je ne veux pas devenir une abrutie incapable de penser par elle-même. Là j'ai fait l'effort d'écrire, je continuerai tant que j'en aurai la force, je ne veux pas qu'un patch mal dosé m'envoie au fond du trou aussi vite. Je vais poursuivre mon objectif, à savoir fêter mon anniversaire le 18 avril.

Alors ciao patch, basta cosi, je retourne aux gélules.

vendredi 15 janvier 2010

- Ben oui ma pov'Lucette, va falloir prendre une décision. Actiskenan ou Matrifen? L'infirmière a oublié de t'appeler hier pour te donner les conseils du docteur AA. Inutile de chercher une réponse dans le regard des trois boules de poils assises au pied de ton lit, tes chiens n'ont d'yeux que pour le bout de pain sec que tu tiens à la main. Mais pourquoi du pain puisque tu ne peux plus mâcher?
- Ben mon pov'Bob c'est pour faire illusion, me donner l'impression que je suis normale et que cette mâchoire peut s'ouvrir et se fermer sans casser, ça n'avait d'ailleurs pas l'air d'inquiéter l'infirmière quand je lui ai dit que je ne pouvais plus cisailler la nourriture avec mes dents. Z'avez qu'à avaler les petits pots énergétiques du docteur AA, qu'elle m'a répondu.
C'est vrai puisque de toute façon je ne mange rien, la nourriture me dégoûte même les petits pots.

Ouais, toujours est-il que décision doit être prise, actiskenan ou matrifen? J'en sais rien, les deux me font du mal, les deux me font du bien, y a-t-il un docteur dans la salle? Les seuls moments où je me lève c'est pour prendre les repas, mais comme je ne mange plus je ne me lève plus, c'est aussi simple que ça, et comme on ne peut pas dire que je sois super bien suivie j'avoue être contente d'être rapatriée à Paris en fin de semaine prochaine, j'espère trouver un médecin qui saura me dire quels médicaments avaler quand un se révèle nocif et en contradiction avec l'autre. Il est là le problème, on vous donne une quantité de pilules à prendre au début, au milieu, à la fin du repas sans se soucier des circonstances et sans se souvenir de ce qui a été prescrit la veille. Et quand on ne mange plus comment faire pour ingurgiter ce qu'on vous demande d'avaler en temps voulu?

J'ai la mâchoire qui flanche et l'autre a le pubis cassé. C'est ça la vie des cancéreux, y'a toujours un truc qui va pas, et on a beau être optimiste, avoir bon moral, faire de l'humour comme MDA sait en faire, une nouvelle douleur apparaît qui sait bien vous replacer au centre de la maladie. MDA est journaliste à Libé, elle tient un blog, elle est mal en point comme moi, très courageuse, plus que moi, et elle lutte avec acharnement contre ce crabe en subissant des séances de chimios et de rayons qui la mettent à plat. J'aime bien la lire, en fait je m'y retrouve, elle décrit son environnement et ses aventures cancéreuses avec un talent littéraire certain, je n'aime pas tout ce qu'elle dit, je n'adhère pas à tous ses choix, mais c'est une soeur de souffrance dont j'attends les posts avec impatience et je m'inquiète quand elle n'écrit pas. Son dernier post était à propos de la fracture de son pubis. Comment en arriver là quand on ne fait aucune folie de son corps? C'est comme ma mâchoire, comment en arriver là quand on ne fait aucune folie de sa bouche en dégustant de bons plats? Ce sont les métastases, ces bestioles rondelettes qui vous assaillent sans prévenir, ainsi de nouvelles douleurs voient le jour, en ce moment pour moi la nouveauté est au niveau de l'estomac, une grosse boule est apparue, comme au cou, derrière la nuque, et puis des douleurs lombaires, dans les jambes, même le pied!

J'aime bien MDA quand elle parle de ses chats Félix et Tralala, c'est drôle, émouvant, et j'y retrouve la vie de mes chiens Titi, Tosca et Troïka sans lesquels mon quotidien ne serait pas le même. Ils sont inséparables, des petits chiens pour lesquels je me fais bien du souci, que vont-ils devenir quand je ne serai plus?

Bon alors, on fait quoi, on avale le produit qui réduit la douleur ou on le met en patch? La différence entre les deux est si grande et les inconvénients si importants que je ne sais pas ce que je dois faire... Le docteur n'est pas joignable il fait les visites, l'infirmière non plus elle l'accompagne. Bon, je vais dormir un peu, ras le bol de réfléchir à ce qui est le mieux pour ne pas sombrer dans le délire ou les nausées.

PS : l'infirmière m'a téléphoné, elle dit que je dois mettre le patch. Ouf! je n'ai pas eu à choisir, la décision a été prise. Merci Y.



jeudi 14 janvier 2010

Dans les files d'attente il y a plusieurs façons de réagir : avec impatience, philosophie, je m'en foutisme. Mais comment réagir dans la file d'attente de la mort? Il ne faut pas croire que je m'inscrive dans l'idée d'une telle file d'attente, loin de là, j'ai conscience de cette mort annoncée et parfois c'est vrai, quand la douleur mord le corps je suis tentée de l'appeler, mais j'aime bien trop le souffle de l'air caressant la peau, le chant de l'oiseau, le bourgeon qui naît, fleurit et vit pour occulter la chance que l'on a d'être sur Terre même si les catastrophes naturelles de cette Terre nous font poser bien des questions. Non, il s'agit là d'une véritable file d'attente de la mort, organisée, sélectionnée, proposée à ceux qui sont en fin de vie.
Mais qu'est-ce que la fin de vie ? S'agit-il des dernières heures, des derniers jours, des derniers mois? C'est la question que je me suis posée en regardant le catalogue d'une maison de fin de vie proposant ses services, un catalogue magnifique avec vue sur les jardins, la chapelle, les ateliers de dessin pour réunions entre malades, bref, un hôtel 3 étoiles pour mourants surnommé "maison de vie". Qui ne voudrait pas aller dans un tel endroit pour y finir ses jours quand chez soi c'est compliqué, qu'on ne veut pas être une charge pour sa famille, qu'on ne veut pas percevoir l'inquiétude des siens vivant au loin et vous sachant isolée ? D'autant que les soins palliatifs sont de qualité ce qui n'est pas à prendre à la légère quand on connaît les degrés de souffrance...
Oui mais voilà... il y a tant de demandes qu'il faut s'inscrire sur liste d'attente, attendre qu'un lit se libère, qu'un mourant s'efface enfin pour laisser place à l'autre. Quand on envoie son dossier il faut être certain qu'on ne vole pas la place d'un plus mal que soi, c'est à dire que la phase finale du cancer est bien réelle avec signes évident de dépendance comme être en fauteuil roulant, relié à des tuyaux, incapable d'autonomie, sinon on vous dit de repasser plus tard. Autrement dit c'est une maison pour "court séjour", d'une dizaine de jours au maximum, pas question d'imaginer comme moi naïvement qu'il sera possible de profiter en paix de ce lieu pour méditer dans le jardin, prier à la chapelle, se retrouver entre malades rien que deux minutes le temps de se comprendre par un simple regard d'amitié.

Non, là c'est "Au suivant".

Eh bien à la réflexion je vais m'organiser autrement, j'entrerai dans une unité de soins palliatifs le moment venu, là je saurai qu'il n'y a pas de chapelle, pas de jardin, seulement la pompe à morphine, et certainement un accueil d'une aussi grande qualité que dans la maison du "Au suivant"...


mardi 12 janvier 2010

Aujourd'hui l'âme est grise alors il me faut tout de même alerter les bien portants et les âmes sensibles qui pourraient lire les pages de ce blog que celui-ci est écrit tant bien que mal par une malade en fin de vie et que des passages un peu trop explicites de la maladie pourraient choquer. Mon but n'est pas d'effrayer mais d'exprimer en toute sincérité avec franchise et honnêteté le quotidien souvent très pénible d'une vie en sursis et de témoigner de ce qui se passe autour de cette maladie avec la prise en charge, les soins, les rires, les larmes, les incompréhensions et les difficultés de s'y retrouver parmi la montagne de médicaments. Quand on n'a jamais été confronté à la gravité de certaines affections, qu'on a toujours eu dans l'ensemble une bonne santé avec seulement quelques maux plus ou moins importants, il est évident qu'on se retrouve en terre inconnue quand soudain la faucheuse décide de vous désigner comme futur zombie. L'univers impitoyable de Dallas n'est rien comparé à la découverte d'un cancer généralisé métastasé. Tout s'écroule à la manière d'un jeu de carte et le corps si vif avant refuse d'obéir au cerveau et se met à gémir comme une vieille chaîne rouillée reliant un navire au quai. Les amarres ne sont pas encore rompues mais on sait déjà qu'un coup de vent plus violent arrachera le bâteau à la rive et qu'il sombrera au milieu de l'océan. C'est ce que j'ai ressenti cette nuit en me réveillant à 3 heures du matin, ivre de douleur, avec l'impression de tanguer au centre d'une mer de crabes. Attaquée de partout par des pinces je me suis entendue supplier l'arrêt de cette torture mais je ne sais pas à qui je m'adressais. Au capitaine du port peut-être, à personne sans doute. Puis je me suis rendormie et nous voilà ce jour si différent de celui d'hier où je me sentais si heureuse de vivre. C'est le délire des médicaments, ils agissent un jour bien, un jour mal. Aujourd'hui est un mauvais jour, il faut faire avec, se battre avec les patchs de morphine impossibles à ouvrir, ça frise le ridicule tant ces petits bouts de papier collées entre eux et renfermant la potion magique ne veulent pas se détacher l'un de l'autre. J'ai fait appel à une personne pour qu'elle m'aide mais comme moi elle a eu un mal fou à détacher le patch pour le coller sur ma peau. A quoi ils pensent ceux qui fabriquent ces anti-douleur, que le malade a la force d'Hercule et des doigts de fée avec des ongles de sorcière pour décortiquer deux papiers serrés afin de décoller le troisième qu'il faut encore détacher de sa double protection? Pfff!

lundi 11 janvier 2010

Il ne faut pas s'isoler dans la maladie, il faut au contraire s'extraire de ce climat pesant pour rester curieux de ce qui nous entoure et continuer à écouter les rumeurs du monde même si l'actualité traîne au fil des jours ses wagons de malheurs. La haine est bien présente, la corruption aussi, aucun progrès à ce niveau depuis que l'homme est apparu sur la Terre, et ce matin encore j'écoutais à la radio les malversations des uns et des autres, les vols, les crimes, les horreurs, bref, le quotidien. Mais hier j'ai regardé une émission qui m'a fait réaliser que j'étais moins malchanceuse d'être atteinte par ce crabe dévastateur que ceux qui après avoir subi un traumatisme crânien ou une rupture d'anévrisme se retrouvaient sans mémoire. Quelle triste réalité de perdre les images du temps passé ou celles du temps présent, de ne plus se souvenir de ce que l'on a fait la minute précédente, d'être incapable de se concentrer sans occasionner des maux de tête effroyable, d'énerver les siens le plus souvent, de sentir que les amis perdent patience et s'éloignent, que l'on a conscience de son état mais que l'on ne peut y remédier malgré tous les efforts, qu'il n'existe aucun remède pour palier à ce désastre et que l'on est condamné à vie à supporter cette situation que je qualifierai de terriblement triste. Ce qui m'a choquée, beaucoup, c'est l'incompréhension d'un fils envers sa mère encore jeune mais déjà très atteinte par la maladie d'Alzheimer. Il lui en voulait, comme si c'était de la faute de cette femme qui se défendait en expliquant que pourtant elle faisait des efforts. Et il lui répliquait qu'il en avait assez de lui répéter cent fois la même chose. C'est là où j'ai j'ai compris combien il était affreux de devenir une charge pour ses enfants, sa famille, son entourage. C'est là où j'ai mesuré ma chance de savoir que la charge que je suis devenue pour les miens ne s'éternisera pas. Mon agonie sera peut-être longue mais elle ne dépassera pas une année et cela me rassure de savoir que mon fils qui fait tout pour m'offrir le meilleur n'aura pas à supporter tous les aléas de cette maladie pendant des mois et des mois. Quant à mon mari c'est affreux pour lui de me voir si mal, cela le ramène à sa propre mort mais aussi à la solitude qu'il devra affronter quand je ne serai plus là, cependant il sera plus doux pour lui de me savoir partie vers l'ailleurs que de continuer à me voir souffrir. La souffrance justement, elle se profile davantage à l'horizon, fracture de la mâchoire en perspective, il ne m'est guère possible de mâcher, désormais je ne pourrai plus avaler que du liquide, bof, cela n'est pas une tragédie car de toute façon je n'ai déjà plus aucun appétit et suis dégoûtée de la nourriture.




J'aime bien cette photo de mon fils et moi déguisés en insectes à l'occasion de l'anniversaire d'Anastasia le 24 septembre dernier. Nous étions à Jurmala où habitent mes enfants et j'étais bien loin d'imaginer qu'un mois plus tard on m'hospitaliserait d'urgence... Il faut profiter de la vie au maximum !

dimanche 10 janvier 2010

Un laid matin d’octobre un médecin au look bouffi de certitudes entra dans ma chambre d’hôpital où j’avais été conduite en urgence quelques jours auparavant et m’annonça sans préambule que j’avais un cancer en phase terminale et qu’il ne me restait plus que deux mois à vivre, voire huit si j’étais de constitution robuste. Ma voisine de chambre ayant entendu les propos discrets de ce docteur au coeur tendre émit un cri strident ressemblant au son d’une baudruche se dégonflant car il faut dire que cette voisine de lit souffrait d’une maladie neurologique qui ne lui permettait de s’exprimer que par des cris ou des râles : elle était muette. Le grand ponte au crâne dégarni jeta un regard méprisant en direction de celle qu’il devait considérer comme une carpe et s’approcha de moi en posant sa main lourde de savoir sur mon épaule en susurrant : "Faut pas vous en faire !"
Non, c’est vrai, dans la vie faut pas s’en faire, c’est juste que là ce n’est pas "l’Annonce faite à Marie" pièce dramatique mais quand même plus mystique que cette annonce de la condamnation à mort ; tiens, j’aurais bien aimé travailler le personnage de Violaine et celui de Mara quand j’étais élève théâtreuse, j’ai toujours été admirative de l’oeuvre de Claudel et à cette occasion je recommande vivement son oratorio "Jeanne au Bûcher" sur la musique d’Arthur Honegger ; mais je m’égare, revenons à la grisaille de ce matin pluvieux qui mit mon âme au supplice. Pas un instant je n’ai pensé à Dieu, au Ciel, à la tombe, à la mort, non, j’ai été prise d’une colère intense, totalement intériorisée, à la fois parce que je ne verrai jamais l’été prochain mon fils sa femme et ses enfants revenir définitivement en France pour s’installer dans un appartement proche du mien pour qu’enfin on vive en famille, et envers cet homme en blouse blanche qui se grattait la tête pour retirer les peaux mortes de son cuir chevelu sans réaliser qu’il venait de prononcer des paroles d’une brutalité inouie.
Puis je me suis laissée emporter dans l’engrenage des jours sans fin quand les examens vous percent le corps de leurs ondes négatives jusqu’au jour où je me suis réveillée en criant "stop !", j’arrête tout, je ne veux plus qu’on injecte des produits dans mes veines qui éclatent, plus entendre le bruit infernal des machines qui vous frôlent jusqu’à croire qu’elles vont vous broyer, plus sentir l’odeur rance et malsaine des couloirs menant aux salles de torture, plus me laisser trimballer sans douceur sur un brancard à travers les courants d’air, je veux juste qu’on me laisse mourir en paix. A cela on me répondit "Vous ne voulez pas vous battre". Non, c’est vrai, je ne me bats pas contre les moulins à vent, je ne trouve pas utile de répondre aux propositions de chimio ni à la radiothérapie pour un soi-disant confort de vie. Quant on est métastasé de partout, que les cotes sont fracturées par ces saletés qui rongent les os, que la moelle épinière se laisse bouffer par le crabe, bref, que le corps entier est encrabouillé, à quoi ça sert de s’épuiser à suivre un traitement qui ne guérit pas, à risquer les brûlures et les effets secondaires, à se faire poser un cathéter pour épargner les veines , à se faire opérer, à passer encore et encore des IRM, des scanners, des radios, tout ça pour épaissir un dossier que les médecins ne regardent même pas ; n’est-ce pas cher pneumologue qui m’examina et s’exclama en lorgnant ma dernière radio : "Mais vous n’avez rien du tout ! je vous retire l’oxygène, on en reparlera dans deux ans…" Curieux que l’échographe eut la même réaction après l’échographie de ces mêmes poumons : "Je ne vois rien, je ne comprends pas qu’on puisse vous dire que vous avez un cancer !" Ben si, j’ai bien un cancer, biopsie a été faite, fallait juste lire le dossier pour savoir que c’est un cancer des ovaires et qu’en principe les ovaires ne sont pas placées à la hauteur des poumons.
En fait ce qui intrigue mon médecin en soins palliatifs c’est que jamais, d’après lui, un cancer des ovaires ne provoque des métastases osseuses. D’où interrogation. Mais où est situé le cancer primitif ? On ne le saura pas parce que je m’en fiche, tous les cancers se valent au final, alors pas question de fouiller mon pauvre corps endolori pour poser le diagnostic exact, la science n’est pas exacte, qu’on me fiche la paix d’autant qu’on me dit que parfois on ne découvre jamais l’endroit où a démarré la maladie.
Mes sœurs de souffrance engagées dans la même galère que moi, c'est-à-dire au stade IV de la maladie et donc en phase finale, m’en voudraient sûrement de ne pas suivre le parcours habituel de la dernière chance avec la chimio et les rayons, mais quand je les lis sur leur blog respectif, surtout une qui lutte comme une vraie combattante de l’impossible, je mesure la chance d'avoir eu la force de caractère de refuser l’acharnement, et tant pis si à cause de cela on m’a renvoyée de l’hôpital le jour même de mon dernier examen sous anesthésie générale parce que je ne voulais pas de chimio. Mes sœurs de souffrance sont épuisées, haletantes, brisées, en chaise roulante, et malheureusement au bout du chemin, elles termineront comme moi, au fond du trou. C’est l’échéance que l’on ne connaît pas, peut-être vivront-elles quelques mois de plus avec leurs séances épuisantes de chimio, mais où est la qualité de vie ?
Malgré les dires de mon oncologue qui m’a prédit la mort par étouffement et la paralysie assurée si je ne suivais pas le traitement que sa conscience professionnelle voulait m’imposer, je reste convaincue que mon corps n’aurait jamais supporté cette agression et ses effets secondaires, chacun doit être libre de choisir, ce n’est pas refuser la vie que de ne pas vouloir s’acharner, c’est au contraire l’aimer et vouloir la conserver le plus longtemps possible dans la dignité et non dans la déchéance. Celle-ci viendra hélas, mais peut-être aurai-je la chance le temps venu d’intégrer une maison médicale spécialisée en soins palliatifs pour aborder la fin de vie dans les meilleures conditions possibles, c’est mon souhait aujourd’hui, puisse-t-il être exhaussé.